Veille juridique du 18 décembre 2017

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DROIT DES AFFAIRES / FISCALITÉ

PLFR 2017: nouvelle incitation fiscale à la cession du foncier

Afin de relancer la construction de logements, les députés ont adopté en première lecture du projet de loi de finances rectificative pour 2017 l’instauration d’un abattement exceptionnel sur les plus-values de cession de biens immobiliers dans les zones très tendues. Les députés ont achevé l’examen en première lecture du second projet de loi de finances rectificative pour 2017. Sur amendement du Gouvernement, ils ont adopté un ensemble de mesures visant à favoriser la construction.
Dans les zones très tendues (A et A bis), les plus-values de cession de biens immobiliers, bâtis ou non, pourraient bénéficier d’un abattement exceptionnel, applicable pour l’impôt sur le revenu, les prélèvements sociaux et, le cas échéant, la taxe sur certaines plus-values immobilières prévue à l’article 1609 nonies G du CGI. L’abattement exceptionnel s’appliquerait sous réserve que l’acquéreur s’engage dans l’acte d’acquisition :
  • en cas d’acquisition d’un terrain à bâtir, à réaliser et à achever, dans un délai de quatre ans à compter de la date d’acquisition, des logements dont la surface de plancher est au moins égale à 90 % de la surface de plancher maximale autorisée ;
  • en cas d’acquisition d’un immeuble bâti, à démolir la ou les constructions existantes en vue de réaliser et d’achever dans le même délai de tels logements.

L’abattement ne s’appliquerait pas en cas de cession, directe ou indirecte, au sein du groupe familial.

Le taux de l’abattement serait fixé à 70 %. Il serait porté à 85% en cas de construction de logements sociaux ou intermédiaires dont la surface habitable représente au moins 50 % de la surface totale des constructions mentionnées sur le permis de construire du programme.

Cet abattement s’appliquerait aux cessions faisant l’objet d’une promesse unilatérale ou synallagmatique de vente, signée et ayant acquis date certaine à compter du 1er janvier 2018 et au plus tard le 31 décembre 2020, à condition que la cession soit réalisée avant le 31 décembre de la deuxième année suivant celle au cours de laquelle la promesse a acquis date certaine.

Par ailleurs, serait prorogé deux ans le régime d’exonération des plus-values de cession d’immeubles destinés au logement social, soit pour les plus-values réalisées jusqu’au 31 décembre 2020 (CGI art. 150 U, 7e et 8e). Serait également prorogé jusqu’en 2020 le dispositif d’exonération sous condition de la plus-value réalisée en cas de cession d’un droit de surélévation (CGI art. 150 U, 9e).

Possibilité de déduction pour l’usufruitier de parts d’une SCI du déficit social portant sur ses revenus fonciers

Infirmant l’arrêt d’appel et la doctrine administrative, le Conseil d’Etat juge qu’en cas de démembrement de titres d’une SCI non soumise à l’IS, l’usufruitier peut imputer, à hauteur de sa quote-part, le déficit social de la SCI sur ses revenus fonciers.

Le Conseil d’Etat tranche par l’affirmative la question de savoir si l’usufruitier de parts d’une société civile immobilière non soumise à l’IS peut déduire la part de déficits fonciers correspondant à ses droits, car en vertu de l’article 8 du CGI, il revient à l’usufruitier des titres de déduire de ses revenus la part du déficit social correspondant à ses droits, symétriquement à l’imposition entre ses mains du bénéfice social.

Pour refuser la déduction chez l’usufruitier du déficit social, l’Administration et la Cour de Bordeaux invoquaient principalement les rôles théoriques respectifs de l’usufruitier et du nu-propriétaire : ce dernier ayant seul la qualité d’associé, il est seul chargé de répondre des pertes, donc de déduire les déficits générés par la société.

CE 8 novembre 2017, n° 399764 (lien)

DROIT SOCIAL

Ratification des ordonnances Macron par l’Assemblée nationale

L’Assemblée nationale a adopté en première lecture, le 28 novembre 2017, dans le cadre de la procédure accélérée, le projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de la loi d’habilitation du 15 septembre 2017. Le Sénat doit maintenant se prononcer sur le projet, mais il le fera en janvier seulement.

  • Rupture du contrat

Il résulte de l’article L. 1233-3 du Code du travail, issu de l’ordonnance n° 2013-1387 du 22 septembre 2017, que la cause économique des licenciements prononcés par une entreprise appartenant à un groupe de dimension internationale doit s’apprécier au niveau du secteur d’activité commun au sien et à celui des entreprises du groupe, établies sur le territoire national.

Cette disposition serait modifiée afin d’étendre au-delà du territoire national l’appréciation de la cause économique du licenciement en cas de création artificielle, notamment en matière de présentation comptable, de difficultés économiques à l’intérieur d’un groupe à la seule fin de procéder à des suppressions d’emplois.

  • Représentation du personnel

La délégation du personnel du Comité social et économique des entreprises d’au moins 50 salariés exercera, comme avant lui le Comité d’entreprise, plusieurs droits d’alerte, notamment en cas d’atteinte aux droits des personnes (C. trav. art. L. 2312-59), de danger grave et imminent pour les salariés (C. trav. art. L. 4131-1 et s.) ou de risque grave pour la santé publique et l’environnement (C. trav. L. 4131-1 à L. 4133-4).

Un amendement de l’opposition, accepté par la ministre du travail, prévoit d’étendre ces droits d’alerte à la délégation du personnel au CSE des entreprises d’au moins 11 salariés mais de moins de 50 salariés.

  • Négociation collective

Les députés ont adopté un amendement de clarification précisant que, sauf disposition contraire, la notion de « convention d’entreprise » couvre non seulement les conventions et accords d’entreprise ou d’établissement mais aussi les conventions et accords conclus au niveau du groupe. Autrement dit, sauf mention contraire, les dispositions concernant les conventions et accords d’entreprise seraient applicables aux conventions et accords de groupe.

  • Santé au travail

Un amendement au projet de loi de ratification entend revenir sur la rédaction de l’article L. 4624-7 du Code du travail relatif aux recours exercés contre l’avis du médecin du travail, telle qu’issue de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017.

Serait modifié l’alinéa 4 de ce texte concernant les frais liés à l’instruction du recours. Dans sa rédaction issue de l’ordonnance, ce texte prévoit que ces frais sont mis à la charge de la partie perdante, à moins que le Conseil de prud’hommes, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie. Or, dans la mesure où la nouvelle procédure de recours ouvre la possibilité pour l’employeur de mandater un médecin expert de son choix, cette rédaction pourrait aboutir à faire peser sur le salarié, s’il était perdant, le coût de cette expertise.

Pour ne pas dissuader les salariés d’exercer un recours, le projet de loi de ratification entend revenir à la formulation antérieure de l’article L. 4624-7, qui prévoyait que le juge prud’homal peut ne pas faire peser la charge des frais d’expertise sur la partie perdante en présence d’une procédure non abusive ou dilatoire.

  • Recours à certains modes de travail

Le salarié licencié à l’issue d’un contrat de chantier ou d’opération devrait bénéficier d’une priorité de réembauche en contrat à durée indéterminée de droit commun chez son ancien employeur. Le délai durant lequel le salarié bénéficierait de cette priorité serait fixé par la convention ou l’accord de branche étendu prévoyant le recours au contrat de chantier ou d’opération.

Rejet du recours en référé de la CGT devant le Conseil d’Etat

Le juge des référés du Conseil d’État a rejeté, le 7 décembre 2017, les demandes présentées par l’organisation syndicale de suspension de certains articles de deux ordonnances du 22 septembre 2017 modifiant le Code du travail (Ord. n° 2017-1386, 22 sept. 2017 et Ord. n° 2017-1387, 22 sept. 2017).

La CGT contestait les articles suivants de l’ordonnance n° 2017-1387 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail:

  • L’article 2 encadrant le montant des indemnités susceptibles d’être mises à la charge de l’employeur en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
  • L’article 4 permettant de préciser les motifs d’un licenciement après la notification de la lettre de licenciement ;
  • L’article 15 modifiant la façon dont la cause économique d’un licenciement doit être appréciée lorsqu’une entreprise appartient à un groupe ;
  • L’article 16 permettant à l’employeur d’adresser de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou de diffuser par tout moyen une liste des postes disponibles à l’ensemble des salariés.

La CGT contestait également l’ordonnance n° 2017-1386 relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l’entreprise et favorisant l’exercice et la valorisation des responsabilités syndicales. N’était contesté par le syndicat que l’article 1er de ce texte, qui crée une instance de représentation du personnel unique au sein des entreprises en remplacement des différentes instances existantes et ouvre la possibilité de créer par accord d’entreprise un conseil économique.

Le rejet de ces demandes ne préjuge pas de l’appréciation que portera le Conseil d’État sur la légalité des deux ordonnances, sur laquelle il se prononcera dans les prochains mois.

CE, ord. réf., 7 décembre 2017, n° 415243 (lien) et n° 415376 (lien)